Des pièces de monnaie romaines dans le linceul de Turin ?

Identification de la pièce de monnaie sous l’oeil droit par les physiciens américains Jumper et Jackson avec l’analyseur VP 8 de la Nasa.

Avant de replier le linceul sur le corps, les domestiques de Joseph d’Arimathie ont-ils placé sur les yeux du mort des pièces de monnaie ? Septième élément du décryptage de l’historien Jean-Christian Petitfils, tiré de son livre Jésus.

On pratiquait parfois cette coutume chez les juifs non pas pour payer l’obole à Charon, le rocher des Enfers, comme chez les Grecs, mais pour empêcher les paupières de se rouvrir dans la tombe.

En étudiant méthodiquement l’image tridimensionnelle du linceul de Turin, telle qu’elle leur était apparue dans l’analyseur d’images VP 8 de la Nasa, les physiciens américains Jumper et Jackson ont observé sur les paupières deux légers renflements laissant supposer qu’on y avait mis des piécettes de monnaie ou des fragments de poterie. À l’agrandissement, sur l’œil droit, on semblait voir une pièce au bord rogné, décolée d’une houlette d’astrologue ou d’un augure païen, un lituus, emblème de Ponce Pilate.

 

Des leptons avec des fautes d’orthographes ?

Monnaie où l’on peut lire TIBEPIOY KAICAPOC, « De Tibère César ».

En 1979, partant de ces premières données, un jésuite américain de l’université Saint-Ignace-de-Loyola à Chicago, le père Francis J. Filas, examinant plus en détail l’objet mystérieux, en conclut qu’il s’agissait bien d’un lepton frappé par le superstitieux préfet de Judée entre 29 et l’an 31, sur lequel on distinguait quatre lettres, CAI provenant sans doute de la légende grec TIBEPIOY KAICAPOC (« De Tibère César »).

Découverte controversée. On objecta que cette coutume juive était douteuse, jusqu’au jour où, au cours de fouilles dans le cimetière de Jéricho, on trouva dans les cavités orbitales d’un crâne deux monnaies du roi Hérode Agrippa (37-44). De même, dans la tombe de Caïphe, on déterra un lepton datant de l’an 42 ou 43. Les archéologues signalent encore deux ou trois autres exemples de telles pratiques, qui disparaissent  au cours du IIe siècle. Certains firent remarquer que ce n’était pas Y KAI que l’on lisait sur le linceul de Turin, mais Y CAI, ce qui évidemment diminuait la force de la démonstration.

Des pièces de Ponce Pilate

Or, en 1981, le père Filas découvrit deux pièces de Ponce Pilate — inconnues jusqu’alors des spécialistes — où figurait cette faute d’orthographe : CAICAPOC. Il triomphait ! Depuis, cinq ou six autres pièces bronze du même type ont été repérées. Il n’est pas rare de trouver des pièces antiques avec des fautes d’orthographe. L’Américain Haralick et l’Italien Barbesino ont confirmé le travail du père Filas.

Plus difficile à déchiffrer, la seconde pièce, remarquée par le professeur Pierluigi Baima Bollone non sur l’œil gauche, mais à l’extrémité de l’arcade sourcilière gauche (comme si elle avait glissé), représenterait la figure d’un vase rituel et l’inscription (cette fois dépourvue de coquille) TIBEPIOY KAICAPOC. Il s’agirait dans cette hypothèse d’un autre lepton de Pilate comportant les lettres LIS, désignant la seizième année du règne de Tibère, soit l’an 29. Pour d’autres, au lieu d’un vase rituel, la pièce figurerait plutôt trois épis de blé liés et aurait été frappée la même année en l’honneur de Julia, mère de Tibère.

Artefacts ou véritables pièces de monnaie ?

Il reste des sceptiques pour affirmer qu’il n’y a là que vues de l’esprit, au mieux illusions d’optique, et que, par le jeu entrecroisé des chevrons de lin, on peut lire à peu près n’importe quoi sur le tissu. C’est l’opinion d’André Marion : « Nous avons retrouvé sans difficulté les images présentées par ces auteurs, mais nous pensons qu’il s’agit de simples artefacts dus à la structure du tissu plutôt que de formes correspondant à des empreintes réelles d’objets sur le drap. » (1) Comment d’ailleurs expliquer le report de leurs empreintes sur le linge ? Cependant, statistiquement, la combinaison des données lisibles sur la pièce identifiée sur la paupière droite — le lituus, les lettres grecques, la rognure du bord de la pièce (courante sur les monnaies antiques) — paraît diminuer les risques d’erreur.

Pour le Père Filas, on ne compte pas moins de 24 points de ressemblance. Utilisant la technique de la superposition en lumière polarisée, Alan Whanger en dénombre 74 pour la pièce de l’oeil droit et 73 pour celle de l’oeil gauche. Serait-on arrivé à une certitude ?

 


Notes

(1) André Marion et Gérard Lucotte, Le Linceul de Turin et la tunique d’Argenteuil, p. 92

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